D’après le témoignage de Robert Loffroy, l’initiative de la commémoration de Guerchy fut prise par de jeunes résistants appartenant au Front national. Une imposante couronne de fleurs, confectionnée par la mère de Pierre Houchot, avait été déposée dans la nuit au monument aux morts. Barrée d’un ruban tricolore, la gerbe de fleurs portait l’inscription : « Aux morts des deux guerres, aux patriotes assassinés par les Nazis ». Des tracts appelant à manifester le 11 novembre à 16 heures sont distribués dans tout le village. Le lendemain, à l’heure dite, près de quatre-vingts personnes sont rassemblées devant le monument aux morts du village. Des bouquets de fleurs sont déposés. Une jeune fille, Josette Bernard, s’avance et entonne La Marseillaise. A son tour, la foule reprend en chœur l’hymne national. Robert Loffroy, surpris par l’ampleur que prend ce rassemblement, affirme avoir vécu « les instants les plus inoubliables » de sa vie.
Un an après le 11 novembre 1942, date qui marque le début de l’occupation totale du territoire français, l’ensemble de ces manifestations du 11 novembre 1943 peut être analysé comme l’expression d’une double hostilité à l’égard de l’occupant allemand et du gouvernement de Vichy.
Sources : Prost Antoine, Les Anciens Combattants et la société française, 3 vol, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1977. Noguères Henri, Histoire de la Résistance en France, tome 1, Robert Laffont, 1967. Boursier Jean-Yves, La Résistance dans le Jovinien et le groupe Bayard, Mémoire et Engagement, Chalon-sur-Saône, 1993, 151 p. Robert Loffroy, Mémoires d’un résistant et militant communiste de l’Yonne, p. 151, ARORY, 2014.
Thierry Roblin