Médecin sénonais responsable d’une filière d’évasion, déporté, auteur d’un récit de déportation

Ragot, à gauche, lors déportation Struthof

 

André Ragot est né le 21 novembre 1911 à Roanne. Son père était directeur de l'Agence des Mines de Blanzy. Il fait ses études au lycée Louis-le-Grand à Paris, puis au lycée de Bourges, quand son père st nommé à Vierzon. Il fait ensuite des études de médecine. Il devient interne à Meaux, accomplit son service militaire à Dijon puis à l'Ecole de Santé de Lyon.

Il s'installe à Sens en 1935, comme adjoint du docteur Pannier et se marie en 1936. Pionnier dans l'application des thérapeutiques modernes d'accouchement, il acquiert rapidement une excellente réputation de médecin accoucheur. Il est mobilisé comme sous-lieutenant à Dijon puis à Jessains. Démobilisé le 30 août 1940,  il reprend son activité médicale à Sens.

Ses activités de résistance sont multiples. Il falsifie des résultats de visites médicales et réalise des injections la veille de la visite des travailleurs requis pour augmenter le taux d'urée dans le sang). Dans le cadre d’une organisation que nous n’avons pu identifier avec précision (s’agit-il du réseau Bordeaux-Loupiac ou d’une autre organisation dépendant du réseau Jean-Marie Buckmaster ?) il constitue une filière d'évasion vers la zone sud qui passe par Châlon-sur-Saône où son père vit depuis 1926 puis vers l'Espagne par Saint-Jean-Pied-de-Port. Cécile Lobry participe avec lui à cette activité.

André Ragot est repéré dans ses activités et surveillé par Stéphane Leuret, sous-préfet collaborationniste de Sens. Il est dénoncé par deux femmes qu'il n'avait pas voulu faire passer compte tenu de leurs motivations et qui se firent arrêter après que la filière ait été démantelée en février 1943. Il est arrêté le 2 juillet 1943 à son domicile par deux Feldgendarmes. Emprisonné à Sens, puis à Auxerre pendant plusieurs mois, il est ensuite transféré à la prison parisienne du Cherche-Midi. Le cabinet de l’ambassadeur de Brinon demande au préfet de l’Yonne s’il faut intervenir en a faveur. Le préfet répond par l’affirmative en affirmant que « le docteur Ragot n’a jamais fait de propagnade antinationale ou germanophobe ». La démarche, si elle eut lieu, resta sans résultat.

Il est déporté au camp du Struthof où il arrive en septembre 1944, puis à Dachau quand ce camp est évacué. Il soigne ses camarades atteints de dysenterie et de typhus, dans des conditions épouvantables. Il retrouve à Dachau le docteur Jean de Larebeyrette.

Libéré le 29 avril 1945, il revient de déportation profondément affecté, amaigri, brisé, malade. Il témoigne en novembre 1946 devant le tribunal de Rastadt, puis en juillet 1947 au procès des tortionnaires du kommando de Kochem où il avait vécu les plus horribles heures de son expérience concentrationnaire. Il est encore présent au procès des responsables du camp du Struthof, en juin-juillet 1954 à Metz.

André Ragot publie en 1946 ses souvenirs de déportation dans un ouvrage intitulé NN (Nuit et Brouillard).

André Ragot est décédé à Sens le 22 septembre 1954, et deux jours plus tard une foule nombreuse assiste à ses obsèques.

 

Sources : AN, Z6/166 dossier 2252 bis, dossier d’instructuion du procès de S. Leuret. ADY, 1130 W 10 (dossier Simone Duval) et 1130 W 40 (dossier André Ragot). André Ragot, docteur et martyr (1909-1954), éd L'Yonne Républicaine, 1955. Ragot André, N.N. (Nuit et Brouillard), éd Cooped, 1946. Drogland Joël, Histoire de la Résistance sénonaise, Auxerre, ARORY, 2ème éd. 1998, 258 pages.

 

Joël Drogland

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